La lumière du Monde
Jésus s’écria : « Moi, je suis la lumière, je suis venu dans le monde pour que celui qui croit en moi ne demeure pas dans les ténèbres » (Jn 12, 46) C’est un des messages fondamentaux de l’Evangile de Jean, dès son prologue, qui inspire à Hunt cette œuvre très célèbre, « La Lumière du Monde ». Exposée en Angleterre et à travers tout l’empire britannique, elle fut l’objet d’un engouement sans précédent, à l’origine, dit-on, de nombreuses conversions. Pleine de mystère, aujourd’hui, elle peut nous surprendre.
En effet, s’il s’agit de lumière du Christ, elle est bien discrète ! Seules son auréole et la lanterne qu’il porte éclairent l’œuvre. On identifie le Christ à son visage conforme à l’iconographie habituelle, à ses pieds nus, à sa longue tunique, à la chape dont les broderies dorées reflètent la lumière, et à la couronne d’orfèvrerie, qui dans l’ombre se confond presque avec une couronne d’épines.
En revanche, sa lanterne est étonnante. S’il est Lui-même la lumière, en quoi aurait-il besoin d’une flamme matérielle et aussi banale ? Vitrée et ajourée comme un ciel étoilé, peut-être que celle-ci nous rappelle que le Christ ne cesse de rappeler qu’il ne vient pas au monde « de sa propre initiative, mais envoyé par le Père (…) » du Ciel dont il partage la sainteté, manifestée par son auréole.
Lumière mangée d’ombre, comme cachée, le Christ frappe à une porte : « Voici : je me tiens à la porte et je frappe ; si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte ; j’entrerai chez lui (…) » (Ap 3, 20) Lui-même ne peut l’ouvrir : elle ne comporte aucune poignée. Il frappe simplement, l’oreille tendue pour saisir même la plus timide réponse. Il ne forcera pas la porte de cœur de l’homme.
Devant celle-ci, un obstacle grandit : des herbes folles, des ronces… fluides, légères, elles n’ont pas l’air bien dangereuses. Mais elles montent à l’assaut de la porte et si l’on ne fait rien, elles la cacheront et la rendront bientôt inaccessible. Ainsi le péché dans notre cœur, si l’on n’y prend garde.
Au fond, une forêt d’arbres aux troncs solides, droits, blessés ou courbés, au bord d’un cours d’eau. Images de ceux qui ont accueilli la Parole du Seigneur, et se fortifient grâce à Sa Lumière, au cours d’une vie parfois tortueuse mais bien enracinée.
Ainsi sont ceux qui ont ouvert leur porte au Christ, lui ont offert le repos dans leur maison et ont pris la route avec lui. Ils sont « comme des arbres plantés au bord des eaux, qui tendent leurs racines vers le courant : ils ne redoutent rien quand arrive la chaleur, leur feuillage reste vert ; dans une année de sécheresse ils sont sans inquiétude et ne cessent pas de porter du fruit. » (Jr 17, 8. cf Ps 1)
William Holman HUNT (1827-1910) 1853-1854. Huile sur toile, 125 x 60 cm. Oxford, Keble college. (une 2e version est conservée à la cathédrale St Paul de Londres)