Ce dimanche 14 février 2016, dimanche de la Santé, Pierre Hégo, diacre dans le doyenné de Cambrai, a assuré l'homélie :
« Qui entendra nos cris »
Dt 26. 4-10 Ps 90.1-2. 10-15 Rm 10. 8-13 Lc 4. 1-13
Mais qu’est-ce que j’ai fait au bon Dieu pour mériter ça ?
Si Dieu existe, pourquoi la guerre ? Je vais à la messe tous les dimanches, tu me dois bien ça ! Pourquoi me laisses-tu ramer à contre-courant ? etc, etc….
N’avons-nous jamais été tentés dans nos moments de désert de mettre à l’épreuve le Seigneur notre Dieu, de l’accabler de tous nos maux ?
C’est vrai, il nous arrive de douter. Tous ces cris adressés à Dieu dans la peine, la guerre, la souffrance, la torture, où sont-ils parvenus ? Se sont-ils perdus ? Etaient-ils mal adressés ? Mais si les cris parviennent au Seigneur, comment se fait-il que sa réponse soit parfois inaudible ? Est-il légitime de crier ?
Alors, en préparant cette homélie, j’ai ressenti le besoin de vous faire tout d’abord partager un chant qu’il me plait de fredonner parce qu’il s’adresse à la fois à Dieu, tout miséricordieux, à Marie, notre Mère toute protectrice, et en même temps...et tout particulièrement en ce jour de la Saint Valentin, à son conjoint, comme un émerveillement de ce qu’il représente :
« Lorsque vient l’hiver et que tu as froid,
c’est à moi que tu donnes un manteau,
Lorsque vient l’orage et que tu as peur,
c’est moi que tu viens rassurer,
Quand la vie est dure et que tu as faim,
c’est pour ma santé que tu trembles,
Un jour tu m’as dit que tous les chagrins,
nous les porterions ensemble.
Lorsque tout est gris et que moi j’ai peur,
c’est au fond de tes yeux qu’il fait nuit,
Lorsque sur mon dos je porte une croix,
ton cœur est alors crucifié,
Quand la route est dure et me fait souffrir,
ton regard est plein de souffrance,
Un jour tu m’as dit, rien ne peut finir,
nous avons la même espérance ».
Oui ! La proximité de Dieu est de tous les instants dans notre vie de tous les jours. Dans le psaume que nous venons de chanter, il y a ce passage :
« .. je le défends, car il connaît mon nom.
Il m’appelle, et moi, je lui réponds ».
Cette relation de Dieu avec chacun de nous est concrète, nous pourrions même dire intime. La grande miséricorde que Dieu accorde au peuple juif après sa servitude en Egypte et sa longue traversée du désert fait ainsi écho à une relation intime de ce peuple qui - et je cite un passage de la lecture du Livre du Deutéronome qui vient de nous être faite – ce peuple qui… « crie vers le Seigneur, le Dieu de nos pères. Il a entendu notre voix, il a vu que nous étions dans la misère, la peine et l’oppression… ». Ce peuple qui crie vers le Seigneur est en même temps un peuple qui prie.
Oui, nous pouvons l’affirmer nous aussi. Dieu est là, présent. Il est à l’image du vent, nous pouvons sentir sa caresse mais ne le voyons pas. Mais alors me direz-vous, pourquoi tant de détresses, de souffrances, de haine, de misère. Et comment expliquer qu’un peu plus de 10.000 personnes par an préfèrent en finir avec cette vie qui ne semble rien leur apporter, qui n’aurait pas de sens. Il serait vite tentant de verser dans le désespoir voire la désespérance.
Jésus, lui aussi a été tenté, …. trois fois, et par trois fois sa réponse, il l’a trouvé en Dieu. La tentation fait partie de notre humanité et Dieu nous laisse libre dans notre choix ; choix d’entrer en intimité avec lui, de se laisser appeler et de répondre à son appel ou alors choix de se créer un quelconque paradigme qui en finalité ne se révélera qu’écran de fumée qui se dissipera bien vite au gré du vent.
En ce dimanche de la santé, nous prierons tout particulièrement pour toutes les personnes souffrantes dans leur corps, dans leur cœur ou dans leur âme.
Les accompagnants bénévoles, les membres du Service évangélique des malades – le SEM -, les membres des aumôneries hospitalières, le personnel soignant, les « personnes de confiance » comme on dit dans le jargon hospitalier sont autant de personnes qui vont soigner, accompagner, rassurer, aider à prier voire même prier à la place du malade comme un trait d’union entre le présent et le futur, proche ou plus lointain.
Le handicap et la maladie s’imposent à nous, mais le Seigneur nous donne la force de les surmonter spirituellement. Il est vrai qu’à l’homme qui souffre, Dieu ne donne pas un raisonnement qui explique tout, mais il offre sa réponse sous la forme d’une présence qui accompagne, d’une histoire de bien qui s’unit à chaque histoire de souffrance pour ouvrir en elle une trouée de lumière, un message d’espérance.
La foi n’est pas une lumière qui dissiperait toutes nos ténèbres, mais la lampe qui guide nos pas dans la nuit, et cela suffit pour le chemin.
Nous avons derrière nous tout notre parcours de vie passé, avec ses joies et ses peines, ses forces et ses faiblesses, ses richesses et ses pauvretés. Mais devant nous c’est tout notre chemin d’espérance qui s’offre à nous.
Comme le disait Saint Jean-Paul II : « nous sommes pèlerins et non errants ! Nous sommes en chemin, mais nous savons où nous allons ! Les errants ne le savent pas. Nous sommes un peuple pèlerin, mais pas un peuple errant. » Dans le Christ, Dieu a voulu partager avec nous cette route et nous offrir son regard pour y voir la lumière. A nous de lui professer notre foi comme prémices pour le salut qu’il nous offre.
Dans cette intimité, n’ayons pas peur non plus de lui parler, de le prier, de crier : « Notre Père qui êtes aux cieux … ne nous soumets pas à la tentation », celle-là même qui consisterai à douter de Dieu, pire, à se tourner vers une certaine désespérance.
« N’ayez pas peur ! » Cette exhortation, prononcée par le pape Saint Jean-Paul II lors de son installation, est présente, comme un hasard, 365 fois dans la Bible, une pour chaque jour de l’année. N’est-ce pas là un signe de la proximité de Dieu dans notre quotidien.
Aux creux de nos errances, de nos peines, de nos souffrances, sans oublier nos joies aussi, sachons regarder vers le Père, sachons l’invoquer par nos prières et sachons l’écouter.
Il entendra nos cris !