L’Ascension
Les Evangélistes situent l’Ascension à des moments différents. L’Evangile du jour nous amène à la contempler avant la fête liturgique.
Pérugin, maître du célèbre Raphaël, élabore une composition très lisible, au dessin précis et aux couleurs nettement différenciées. Ses personnages, idéalisés, sont empreints de douceur. L’œuvre est divisée en deux espaces bien distingués : le monde céleste que le Christ rejoint, et le monde terrestre.
Dans le ciel d’un bleu éclatant, la joie est exprimée par les anges musiciens et le mouvement volant des drapés, des ceintures et des phylactères. Au centre, une mandorle double entoure la figure du Christ. Signe de manifestation divine et de vie, elle est peuplée de séraphins à six ailes qui, normalement, entourent le trône céleste. Jésus désigne le ciel de ses mains, geste repris par les deux anges qui volent gracieusement de part et d’autre de la mandorle.
« Le Seigneur Jésus fut enlevé au ciel » (Mc 16, 19) S’élevant vers la droite du Père, il regarde pourtant vers la terre. Son incarnation n’est pas une parenthèse dans son éternité divine. Les stigmates bien visibles l’attestent. Il regagne la Gloire divine avec son humanité, ouvrant une espérance nouvelle pour tous les hommes.
Ceux-ci le regardent s’élever, l’adorent, s’interrogent et nous interrogent du regard, car le mystère est grand. Pierre se cache les yeux, comme Moïse au Sinaï ou comme au jour de la Transfiguration, ébloui par la gloire divine. Tous sont droits, statiques, les pieds à peine décalés, selon les canons antiques alors redécouverts.
Le groupe des disciples entoure Marie, sans la toucher. Mise en valeur, elle est placée juste sous la mandorle qui effleure sa tête. Elle est celle qui a recueilli au plus intime de son être le Fils divin, sous l’ombre de l’Esprit. Elle est la première à avoir reçu la vie divine, et sera la 1ère à monter au ciel à la suite de son fils.
Dans l’iconographie post-pascale, Marie, confiée à Jean par Jésus, prend souvent une place centrale dans le groupe des disciples. Autour d’elle, le groupe des apôtres est plus étonnant. On y trouve Paul, en pendant de Pierre, et Thomas, successeur de Judas. Or, le choix de Thomas et la conversion de Paul sont postérieurs à l’Ascension. L’Evangile de Marc précise même que cela se produit uniquement en présence des onze apôtres. Erreur chronologique ou choix riche de sens ? Les dernières paroles de Jésus avant de s’élever dans le ciel appellent les apôtres à « aller dans le monde entier pour proclamer l’Evangile à toute la création » (Mc 16, 15). Paul, « colonne » de l’Eglise naissante avec Pierre, et Thomas se donneront entièrement à cette mission. Avec les onze, ils ne partent pas encore sur les routes du monde. La force de l’Esprit de Pentecôte leur en donnera le courage.
Le Pérugin (c. 1445-1523) 1496. Huile sur toile, 3,25 x 2,65 m. Lyon, musée des Beaux-Arts